Comment sécuriser le crédit d’impôt recherche (CIR)?
Les entreprises industrielles, commerciales, artisanales ou agricoles, imposées d’après leur bénéfice réel passible de l’IR ou de l’IS, peuvent bénéficier d’un Crédit d’Impôt Recherche (CIR) lorsqu’elles exposent des dépenses de recherche éligibles sous certaines conditions.
Le CIR est indiscutablement un sujet sensible, tant du point du vue des entreprises que de celui de l’administration fiscale. Les enjeux budgétaires sont par ailleurs considérables (5,8 milliards de dépenses budgétées à ce titre par l’Etat pour l’année 2014).
Le contrôle du CIR
La réalité de l’affectation à la R&D des dépenses prises en compte pour la détermination du CIR peut être vérifiée par l’administration fiscale. Le droit de reprise de l’administration s’exerce jusqu’à la fin de la troisième année suivant celle du dépôt de la déclaration 2069-A-SD.
Le contrôle du Crédit d’Impôt Recherche s’inscrit habituellement dans le cadre des contrôles généraux de la comptabilité des entreprises, mais il arrive souvent que le CIR donne lieu à un contrôle ponctuel, notamment en cas de demande de remboursement.
Rappelons que lors d’une procédure de contrôle fiscal, l’administration fiscale peut solliciter l’avis du Ministère de l’Education Nationale, de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (MENESR) toutes les fois où l’appréciation du caractère scientifique des travaux apparaît nécessaire.
Olivier Sivieude, chef du service du contrôle fiscal à la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP), a récemment confirmé, lors d’une conférence-débat organisée par l’IACF1 le 3 juin 2014 (à laquelle participait également Christian Orfila, chef du département des politiques d’incitation à la R&D au MENESR), que le CIR pose des difficultés lors des contrôles fiscaux.
Il a signalé toutefois que, contrairement aux idées reçues, il n’y pas de consignes particulières données aux services vérificateurs pour déclencher un contrôle fiscal lorsqu’une entreprise souscrit une déclaration de CIR.
Lors d’un contrôle fiscal, la première question posée est l’éligibilité des dépenses de R&D au CIR : l’entreprise est-elle allée au-delà de l’état de l’art connu ? Même si la réponse à cette question relève de spécialistes, il est utile de rappeler que l’appréciation de la nouveauté ou de l’amélioration substantielle de produits, services ou procédés, au sens du CIR, suppose l’établissement préalable d’un état des techniques existantes, ou état de l’art, qui permettra d’apprécier le degré de nouveauté ou d’amélioration qu’un projet se fixe comme objectif et d’identifier les difficultés auxquelles l’entreprise se heurte pour mener à bien son projet et atteindre ses objectifs. Dans un deuxième temps, il est indispensable pour l’entreprise d’identifier et de documenter les moyens humains et techniques consacrés à cette dépense de R&D éligible. En effet, lors d’un contrôle fiscal, la reconstitution a posteriori d’éléments de preuve est extrêmement délicate.
Les modalités de calcul du CIR seront ensuite examinées par les services vérificateurs. Rappelons qu’un des éléments principaux de l’assiette du CIR est constitué par les dépenses de personnel dont la définition est vague et fait l’objet de nombreux contentieux. A cet égard, la DGFiP a indiqué qu’un projet de commentaires BOFiP2 est actuellement à l’étude au sein des services de la DLF3.
Comment sécuriser les dossiers de CIR ?
Un des premiers problèmes constatés par les services vérificateurs (et par les experts détachés par le MENESR) lors des opérations de contrôle, est l’absence de documentation des dossiers de CIR au sein des entreprises. Afin d’aider ces dernières à remplir leur déclaration de CIR et à sécuriser leur démarche en cas de contrôle fiscal ultérieur, la DGFiP met à leur disposition, depuis février 2014, une notice pédagogique qui permet à l’entreprise de déterminer si son projet de recherche ouvre droit au CIR. L’utilisation de cette notice est facultative et n’est pas opposable à l’administration fiscale. Il existe également un modèle de dossier d’expertise unique élaboré par les services du MENESR4 où il est demandé à l’entreprise de décrire chacun de ses projets de R&D, année par année. Il est fortement recommandé aux entreprises de ne pas attendre un contrôle de l’administration fiscale pour commencer à constituer ce dossier. Les directions de la DGFiP, du MENESR et de la DGCIS5 ont récemment signé un protocole d’engagements (non public) en matière de CIR par lequel le MENESR s’engage, notamment, à ce que ses experts dialoguent plus avec les entreprises. Depuis la mise en place du nouveau Crédit d’Impôt Innovation (Cil), se pose également la problématique d’une entreprise qui aurait déclaré à tort, au titre du CIR, des dépenses qui relèvent en réalité du Cil. La DGFiP a indiqué lors de la conférence susmentionnée que l’entreprise aurait alors la possibilité de faire a posteriori une déclaration rectificative de Cil. Cette possibilité devrait être confirmée prochainement par la voie de commentaires administratifs.
La DGFiP a également annoncé que le gouvernement envisage de mettre prochainement en place (par voie législative) une commission nationale en charge du CIR. Cette commission rendrait un avis consultatif.
Enfin, il est possible pour une entreprise de sécuriser a priori un dossier de CIR en recourant au rescrit. L’intérêt de la procédure de rescrit spécifique au CIR réside dans le fait que l’absence de réponse dans un délai de trois mois vaut acceptation tacite. Les demandes de rescrit peuvent désormais être déposées jusqu’à six mois avant la date limite de dépôt de la déclaration 2069-A-SD. Il ressort toutefois d’un rapport de la Cour des comptes (juillet 2013) que le rescrit CIR est malheureusement très peu utilisé par les entreprises (seulement 1,3 % des rescrits fiscaux en 2012, soit 235 demandes de rescrits, et il semblerait que les demandes en 2013 soient inférieures).
Source : SIC 330 juin 2014
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